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Moka

Le projet

L’idée première de ce projet est d’imbriquer deux milieux à priori opposés, afin de raconter une nouvelle histoire. Le point de départ est souvent une vue de l’intérieur d’une piscine publique, lieu en général physiquement clos. L’idée est, comme le font les usagers et le personnel, d’amener le monde extérieur vers la piscine et inversement.

La détente et/ou la fatigue, la « bonne » fatigue, le changement de sensation, l’impression de voler (les astronautes ne s’entraînent-ils pas pour se préparer à l’apesanteur en effectuant les exercices dans l’eau ?) amènent ces possibilités de rêve à la portée de presque tous. Le bain peut être aussi un moment privilégié où l’on fait un retour sur soi, ses sensations, son état.

Ce monde extérieur peut être réel ou imaginaire, inspiré ou non d’une œuvre artistique. Evoluer dans l’eau permet de se dépenser mais le milieu aquatique est également propice à la rêverie. Le corps dans l’eau perd ses repères habituels. Le réel et l’imaginaire, l’extérieur et l’intérieur, l’aquatique et le non aquatique se mélangent dans cette « fusion » de deux mondes où l’ambiguïté règne.

Plongez tout habillés dans l’exposition troublante du duo MokA, composé du graphiste Olivier Maitre, du maître-nageur, musicien et photographe Karim Adjali et depuis 2022, de la graphiste Stéphanie Regerat.

Bonne immersion !

MokA Lignes à découvert

À contre-courant du préjugé selon lequel les piscines publiques seraient des lieux froids, aseptisés et interchangeables, le duo MokA révèle le riche potentiel artistique d’infrastructures urbaines qui favorisent la mixité à la fois sociale et générationnelle. Grâce à des photographies qui mêlent culture classique et pop-culture – on y croise aussi bien l’Ophélie de Shakespeare et Rimbaud que la déesse Shiva, des joueurs de bowling et un bistrotier derrière son comptoir – Karim Adjali et Olivier Maitre s’amusent dans leurs compositions poétiques non dénuées d’humour à poser sur les piscines et ceux qui les fréquentent un regard empreint d’une malicieuse fantaisie.

Car avant de plonger dans les bassins, on laisse ses tracas au vestiaire, prêt à libérer non seulement son corps mais aussi son esprit : au fil des longueurs ou des cours d’aquagym, l’imagination travaille en effet tout autant que les muscles. L’histoire du cinéma montre bien, de Jacques Tourneur (Cat People/La Féline) à Ron Howard (Cocoon), à quel point les piscines sont un réservoir fertile pour l’imaginaire voire le fantastique. Avec MokA, nous sommes ainsi invités à la piscine Mulinghausen des Lilas pour assister à une mission spatiale. Ailleurs, c’est une façade d’immeuble transformée en couloir de nage qui nous pousse à interroger notre perception de la verticalité et de l’horizontalité.

Ludiques et oniriques, les photographies proposées dans cette exposition enchanteront petits et grands, qui ne seront bientôt plus surpris de déceler des visages dans des planches en mousse (réjouissante paréidolie depuis un conteneur à déchets !) ni d’apercevoir, dans l’entrelacs des flotteurs en plastiques, un monstre tentaculaire.

Anne-Sophie GOMEZ
aquacult.hypotheses.org